Friday 27 March 2020

Vingt leçons de tango : Dixième partie : Affirmez vous

Commencez par vous asseoir, vous tenir debout et marcher
comme le danseur confiant que vous souhaitez devenir.

Traduit par François Camus
Lire le texte originale en anglais ici

En 2017 j'ai souligné mes 20 ans en tango en écrivant une série de 20 articles, ou leçons, apprises sur, autour ou à travers le tango au cours de deux décennies à le danser, l’enseigner, donner des spectacles, gérer une école et organiser des événements.

Leçon no 10 : Soyez clair sur ce que vous voulez.

J’étais une enfant gênée et une adolescente manquant de confiance. Ça m’a pris des décennies pour apprendre comment m’affirmer, à dire non, à me défendre et à demander ce que je veux. Le tango, le danser et l’enseigner, est l’une des choses qui m’a à la fois aidé sur le chemin de l’affirmation et à apprendre l’importance de cette qualité – dans la danse et dans la vie.

Sur la piste de danse

Les avantages d’être clair à propos de ce qu’on veut semblent évidents quand il est question de guider, mais les guidées doivent aussi être claires.

Commençons par les guideurs. Si vous ne savez pas ce que vous voulez, votre guidée ne le saura certainement pas. L’hésitation génère de l’hésitation. Si vous attendez continuellement de voir si votre partenaire va vous suivre, elle sera dans un constant état de doute, et ainsi sera la danse. Personne n’a dit que guider était facile : vous devez simultanément attendre votre partenaire et lui laisser savoir où vous voulez qu’elle aille par la suite. Ceci signifie que vous savez toujours où vous voulez aller par la suite. Bien sûr les choses ne se déroulent pas toujours comme prévu en tango (c’est le sujet de mon prochain article), mais vous devez quand même avoir un plan et l’exprimer clairement (par les gestes, pas les mots bien sûr) sinon la danse sera bordélique plutôt que spontanée.

De plus, si vous ne savez pas où vous voulez que chaque pas touche le sol ou que chaque pivot se termine, que ce soit le vôtre ou celui de votre partenaire, vous aurez peu de contrôle sur votre ligne de danse et l’espace que vous occupez sur la piste. Ceci placera votre partenaire à risque et dérangera les autres danseurs autour de vous.

En ce qui concerne les guidées, si j’ai un conseil à donner c’est celui-ci : ne soyez pas passives. Étreignez votre partenaire comme vous aimeriez l’être, dansez la musique comme vous la ressentez, prenez le temps dont vous avez besoin pour compléter chaque mouvement avant d’aller au suivant. Possédez votre danse et non seulement elle vous satisfera davantage, mais il sera plus satisfaisant de danser avec vous.

Certains penserons que je suis en train de dire aux guidées, « Faites comme bon vous semble, » mais ce n’est pas ça du tout. Tout ce que les guidées font doit demeurer dans le cadre créé par votre partenaire et la musique, et dans ce cadre, il y a énormément d’espace pour vous exprimer et danser. Mais vous devez faire ça : danser.

N’hésitez pas, ne vous demandez pas quoi faire, ne questionnez pas, ne vous inquiétez pas. Acceptez chaque mouvement, chaque réaction et complétez-le de façon décidée. S’il y a eu une mauvaise communication, il est trop tard de toute façon pour la corriger, alors finissez le pas et continuez de là. Croyez que vous savez ce que vous avez à faire et vous suivrez davantage, pas moins, parce vous éliminerez toutes les préoccupations et les hésitations, vous permettant de recevoir les messages du guideur avec moins d’interférence. Non seulement ça, mais si vous dansez de façon plus confiante, votre guideur recevra vos messages plus clairement, écoutera davantage et la tanda deviendra une fascinante conversation plutôt qu’un monologue à sens-unique.

En dehors de la piste de danse

La façon dont vous vous tenez en dit beaucoup. Si vous entrez dans la pièce avec élégance et détermination, vous allez être remarqués, et si vous vous tenez droits lorsque vous êtes assis ou debout, vous aurez l’air de savoir danser avant même d’avoir commencé à le faire. J’ai entendu plus d’un maestro dire qu’il faut être un danseur de tango dès le moment qu’on franchi la portée d’entrée. La posture influence non seulement notre apparence, mais aussi comment on se sent. Le simple fait de soulever et d’ouvrir la poitrine peut alléger des sensations de déprime, par exemple, alors si vous vous tenez bien droit, vous pouvez vous sentir plus confiants. Essentiellement, tenez-vous comme un danseur, vous en aurez l’air et vous vous sentirez comme tel. Et vous en recevrez probablement plus de miradas et de cabeceos.

Je suis devenue une convertie et un promoteur du système d’invitation mirada-cabeceo. « Mirada » signifie « regarder », « cabeceo » signifie « signe de tête ». Ensemble ils constituent le mode d’invitation non-verbal traditionnel. C’est la méthode la plus largement acceptée d’inviter et de se faire inviter à danser le tango. Essentiellement, les guideurs et les guidées regardent directement la personne avec laquelle ils souhaitent danser en espérant que leurs regards se croisent. Ensuite, le guideur fait un signe de tête en guise d’invitation et la guidée fait un signe de tête ou un sourire pour accepter.

Vous trouvez l’idée intimidante? Vous n’êtes pas le seul. Parce que je suis encore fondamentalement une personne timide qui manque de confiance en moi, j’ai moi aussi trouvé difficile de maîtriser cette façon de faire. D’accord, d’accord, j’ai encore parfois de la difficulté.

Une fois sur la piste de danse, je sais comment danser comme si je sais ce que je fais, mais hors de la piste, c’est difficile pour moi de m’affirmer en regardant une personne directement dans les yeux, surtout un étranger. Tout ceci pour dire que je comprends qu’au début ce n’est pas un système nécessairement facile. Le tango non plus. Et si vous pouvez apprendre cette danse complexe, vous pouvez apprendre ce simple échange.

Ça en vaut la peine parce que ça marche. Cela signifie que vous n’êtes pas assises en attendant passivement d’être choisie par quiconque décide de marcher jusqu’à vous pour vous inviter. D’autre part, vous ne rendez pas quelqu’un inconfortable parce que vous tournez autour. Vous ne risquez pas non plus de subir un rejet parce que vous avez fait une demande directe, risquant soit un rejet direct, ou d’obtenir un « oui » réticent de quelqu’un qui ne veut pas vraiment danser avec vous mais qui ne veut pas vous blesser.

Le système mirada-cabeceo fonctionne parce qu’il est affirmatif des deux côtés. Je dois regarder directement la personne avec laquelle je souhaite danser et il ou elle doit me regarder en retour. Ensuite, le signe de tête avec peut-être un sourire ou un haussement de sourcil, et on y va. Nous choisissons tous deux nos danseurs. Cet accord mutuel non-verbal peut être magique une fois qu'on a compris, comme si on avait conclus un accord secret dont personne n’a connaissance jusqu’à ce qu’on soit soudainement sur la piste de danse dans les bras l’un de l’autre, prêts pour une merveilleuse tanda.

En dehors de la milonga

Si vous voulez devenir vraiment bon en tango, vous devez prendre la décision de le devenir. J’ai abordé ce sujet dans mon article précédent, « Franchir le seuil du niveau avancé », quand j’ai nommé la détermination comme l’une des clés du succès. Essentiellement, vous devez le vouloir et foncer, poser des actions concrètes pour atteindre votre but.

J’ai visionné une intéressante vidéo « TED talk » portant sur ce qui mène au succès des gens qui ont du succès. Il a été découvert que le facteur commun toujours présent est la persévérance ou la détermination que j’ai mentionnée. Je regardais cette vidéo en ayant à l’esprit l’éducation et le futur de mes enfants, mais lorsque je regarde les meilleurs danseurs autour de moi, au-delà de leur talent et des années de travail investit, je vois ce quelque chose de plus profond, cette ambition et cette détermination qui amplifient le talent, alimentent le travail ardu et leur donne cette profonde conviction que parce qu’ils veulent y arriver, ils vont y arriver. Et ils le font. Vous le pouvez aussi.

Le tango m’a beaucoup appris à ce sujet et je crois qu’à cause de cela je suis meilleure danseuse, professeur et femme d’affaire. Comme j’ai déjà mentionné, il y a encore en moi une personne qui manque de confiance, mais à ses côtés il y a maintenant une personne beaucoup plus confiante qui sait ce qu’elle veut, qui part souvent à sa poursuite et vit une vie beaucoup plus satisfaisante en conséquence.

Article précédent : Leçon no 9: Franchir le seuil du niveau avancé.

Prochain article : Leçon no 11: Acceptez que les choses n'aillent pas toujours tel que planifié.

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